Marion DESSERTINE
QVT et performance des entreprises : un lien fort et prouvé
Dernière mise à jour : 25 août 2020
La mesure chiffrée de l’impact de la QVT sur la performance globale de l’entreprise
La QVT impacte l’entreprise et sa performance car c’est le facteur qui permet de mettre en cohérence les choix économiques et organisationnels de l’entreprise, et l’activité des salariés.
Dans la littérature, plusieurs types de mesures permettent d’estimer l’impact, comme le retour sur investissement des dépenses en faveur de la QVT. Pour les études s’intéressant au retour sur investissement des dépenses de QVT, c’est avéré, la QVT renforce la performance et la compétitivité des entreprises. Ainsi, une étude menée par le bureau de normalisation du Québec a même établi une mesure chiffrée de cet impact. Ainsi, 1$ CA investi dans la QVT génère entre 2,75 et 4 $ CA de rentabilité. En France, en 2013, une mesure a été réalisée par les économistes Alexandre JOST et Olivier PASTRE à partir d’une recension quasi exhaustive des études économiques consacrées au lien entre le bien-être et l'efficacité productive, qui évaluent à 1% le potentiel de croissance économique lié à la prise en compte du bien-être au travail.
La principale mesure utilisée dans la littérature est celle des coûts. En effet, selon Soenen (2017) « pour saisir les enjeux économiques de la santé au travail, il faut distinguer d’une part les éléments liés aux coûts de la non-santé et d’autre part la contribution potentielle du capital santé à la performance économique et sociale ». L’enjeu économique de la non-prévention est aussi important que celui de la prévention. La vision par les coûts, dans la littérature, apparait centrale pour mesurer les impacts sur la performance globale qui est multidimentionnelle. Dans la littérature assez fournie des mesures par les coûts, ceux-ci sont estimés au niveau des entreprises et des États. A travers une revue des différentes études des coûts, l’agence européenne de santé (2014) dresse une liste des facteurs pris en compte dans le calcul des coûts liés aux risques psychosociaux et au stress. Ainsi, l’absentéisme (notamment les arrêts maladie), les médicaments, les accidents, la gestion des ressources humaines, les décès prématurés, la retraite anticipée, les fais de santé et médicaux, les frais de justice, les pertes de revenu, le présentéisme (les salariés font semblant de travailler), le gonflement des effectifs pour compenser les absences, les pertes de production ou encore la rotation du personnel, sont autant de dépenses engendrées et de coûts qui pèsent sur la performance de l’entreprise. Bref, toutes ces dépenses coûtent cher à l’entreprise, que ce soit en termes de charges, d’image perçue, de qualité de produit, mais aussi à la société dans son ensemble.
En 2014, l’agence européenne pour la sécurité et la santé au travail a réalisé une importante étude documentaire des différentes mesures des coûts du stress et des risques psychosociaux liés au travail. L’agence définit trois types de coûts : pour la société, pour les organisations, pour les secteurs économiques. Au niveau européen, en 2013, le stress au travail engendrerait des coûts estimés à 25,4 milliards d’euros, contre 13,79 pour l’Australie et 1,36 à 2,3 milliards pour la France. Aux Etats-Unis, les violences au travail coûteraient 43 milliards d’euros. Pour le BIT, les coûts économiques représenteraient 4% du PIB mondial, soit 2 800 milliards de dollars nécessaires chaque année pour couvrir le temps de travail perdu, les interruptions de production et les frais de traitement, de réadaptation et d’indemnisation occasionnés par les lésions et maladies professionnelles (BIT, étude sur la sécurité et la santé au travail, 2017)
Pour l’INRS, qui s'est attaché aux conséquences économiques du job strain : "une forte pression subie au travail et l'absence d'autonomie dans l'organisation du travail, les méthodes et dans l'ordre des tâches à réaliser", les effets sur la santé (maladies cardiovasculaires, dépression, troubles musculosquelettiques) coûteraient 1,9 à 3 milliards d’euros, incluant le coût des soins et la perte de richesse pour cause d’absentéisme, de cessation prématurée d’activité et de décès prématuré. Néanmoins, cette évaluation financière ne prend pas en compte tous les coûts, notamment les coûts invisibles comme la souffrance de l’individu, la perte de bien-être (INRS, Le coût du stress professionnel en France en 2007).
Les leviers de la performance économique par la QVT
Au-delà de cette mesure chiffrée, il est important de comprendre les leviers d’action entre QVT et performance. Par quoi passe cette performance ? Quels sont les facteurs ou actions à mettre en place, à privilégier pour obtenir un tel retour sur investissement ?
Dans la littérature, plusieurs mécanismes permettent de relier le bien-être au travail et la performance de l’entreprise.
D’un point de vue, global, la performance est permise par l’effort individuel de chaque salarié, les compétences (les entreprises forment les salariés), la coopération entre les salariés (gain de productivité sont dans la coopération inter-service). Le tout est de combiner ces trois forces dans une entreprise pour atteindre la performance.
L’engagement des salariés est le levier le plus souvent cité par les études (DIRECCTE Rhône-Alpes publiée en 2014, une étude américaine en 1999, Nadisic (2017). C’est, selon la littérature, le facteur le plus impactant de la QVT sur la performance globale de l’entreprise. En effet, en 1999, une étude américaine révèle que la QVT renforce l’engagement des salariés et permet de diminuer le taux d’absentéisme et la fréquence des retards. Pour Nadisic (2017), lorsqu’un collaborateur est absorbé dans l’action, il investit l’ensemble de ses compétences,
La satisfaction des salariés apparait également comme un levier déterminant pour la performance. Selon le cabinet de conseil Ayming (Baromètre de l’Absentéisme et de l’Engagement 2018), 42 % des absences en entreprise sont liées à la qualité de vie au travail et à l’insatisfaction des salariés. Ce facteur arrive en tête dans toutes les catégories d’âge, devant les arrêts pour accident du travail/maladie professionnelle (31 %). Selon Bachelard (2017), « la satisfaction est un état émotionnel positif qui résulte de l’évaluation faite de son emploi (tâches, relations avec les autres agents, avec la hiérarchie, rémunération). Ainsi, dans cette approche, la représentation qu’a le salarié de son rôle au travail est fondamentale et les salariés sont durablement investis car ils sont satisfaits des conditions matérielles, y compris conditions de vie au travail »
D’autres facteurs déterminant la performance globale de l’entreprise sont soulignés par la littérature, notamment l’instauration d’un fonctionnement propice à l’innovation et la diminution de l’absentéisme et du turn-over. Au-delà de ces facteurs organisationnels, Nadisic (2017) propose quatre leviers pour un bien-être au travail qui soit source de performance organisationnelle, il s’agit de la mobilisation d’émotions positives, des relations sociales au travail ressource positive pour développer le lien social, une même vision pour avancer ensemble (car le sens de l’action est la quatrième facette du bien-être au travail) et enfin les accomplissements, c’est-à-dire les réussites concrètes, qui donnent à chacun envie d’aller plus loin.