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  • Photo du rédacteurGilles MATHOULIN

Des risques psychosociaux à la qualité de vie au travail

Dernière mise à jour : 25 août 2020

La distinction entre les risques psychosociaux et la qualité de vie au travail n’est pas évidente. Cet article a pour ambition de clarifier ces deux notions dont les pistes d’actions de prévention sont assez différentes.

Les évolutions profondes du monde du travail durant ces dernières décennies ont rendu centrale la question de la santé au travail, tant physique que psychologique, au point de s’imposer dans le débat public. De nombreux auteurs parlent de ces évolutions du monde du travail : concurrence accrue, intensification du travail, programmes de restructuration, adaptation à de nouvelles technologies… (Volkoff, 2005 ; Castel, 2009). Depuis le début des années 2000, les recherches ont démontrés les conséquences négatives de ces évolutions sur les salariés (Gollac et Volkoff, 2000) mais aussi sur les collectifs de travail (Caroly, 2010) et avec des impacts sur la santé économique des entreprises (Abord de Chatillon, 2003).

Les « RPS »

La notion de risques psychosociaux est venue qualifier l’ensemble des situations de tension auxquelles sont soumis les salariés dans leur environnement professionnel. Ils regroupent les situations dites de stress (tensions organisationnelles) ainsi que les violences au travail (tensions relationnelles aussi bien avec le public qu’en interne, avec les collègues, hiérarchiques ; nous parlons alors de situations de conflits graves, parfois de harcèlement).

Ces facteurs de risques psychosociaux ont été particulièrement bien étudiés au point d’aboutir à un consensus. Suite à une commande du gouvernement, en 2010, une équipe de chercheurs pilotée par Gollac a produit des indicateurs de risques psychosociaux. Aujourd’hui, six types de facteurs permettent de classer les RPS : l’intensité et la complexité du travail, les exigences émotionnelles, l’autonomie, les relations de travail, les conflits de valeurs, l’insécurité de la situation de travail.

La prise de conscience des risques psychosociaux s’est inscrite dans le Code du Travail. Depuis 2002, l’employeur doit préserver la santé physique et mentale des salariés. A cela s’ajoute, l’obligation d’inclure les risques psychosociaux dans le Document Unique de Prévention des Risques Professionnels (DUERP) ainsi que les actions pour les supprimer ou les réduire.

En termes d’actions, nous avons vu de nombreux outils de diagnostic être proposés aux entreprises pour les accompagner à répondre à ces obligations légales : questionnaires, entretiens, mise en place de comité de pilotage pour soutenir les démarches et le dialogue social sur ces questions… Nous devons avoir conscience que la notion de RPS s’est construite sur le socle de la souffrance au travail avec un regard individualisé de ces problématiques (Clot, 2010). La stigmatisation individuelle lors de ces diagnostics est un risque à prendre en compte : risque d’orienter le regard vers des salariés qui pourraient être qualifiés de fragiles, culpabilisation des managers estimés responsables de la dégradation de la santé, d’autres risques existent, instrumentalisation du dialogue social…

La « QVT »

La qualité de vie au travail, quant à elle, oriente différemment le regard sur les questions de santé au travail. En juin 2013, en France, un Accord National Interprofessionnel a été signé pour les entreprises du secteur privé : « La notion de qualité de vie au travail (…) révèle potentiellement une nouvelle ambition puisqu’il s’agit de dépasser les impasses de la souffrance au travail pour repositionner le travail au cœur d’enjeux capables d’articuler conjointement performance économique et performance sociale. ». La qualité de vie au travail devient donc le chemin pour conjuguer performance globale et santé. Ainsi, les actions à mettre en place vont viser le « prendre soin du travail ».

Aujourd’hui, un grand nombre de chercheurs oriente leurs études sur le développement des compétences à débattre du travail dans les collectifs de travail en instaurant des espaces de discussion et de décision. Dans nos interventions, nous suivons ces orientations et les résultats sont extrêmement prometteurs (Debard, 2015).

Ces dispositifs mis en place dans les entreprises accompagnent les managers à se positionner comme des acteurs majeurs de la santé de leurs équipes et… de la leur. En mettant en discussion ce qui vient faire tension dans le travail et en organisant la prise de décision, l’innovation et la créativité accroissent l’intelligence collective.

La qualité de vie au travail intervient dans le débat public comme un trait d’union entre la santé et la performance. Si les risques psychosociaux sont des « accidents de la route professionnels » et organisationnels, il convient de les prévenir pour les éviter et de les accompagner quand ils adviennent. Pour autant, mettre en place des actions orientées vers la qualité de vie au travail permet, collectivement, d’instaurer une culture pérenne de la santé, de la qualité de vie au travail et de la performance globale. La coexistence de ces deux thématiques, les RPS (que l’on cherche à réduire) et la QVT (que l’on cherche à accroitre), mérite une double attention, cette vigilance sur deux axes oriente sans doute vers un équilibre sans cesse à ajuster.


Annie Debard

Docteure en Psychologie du Travail et des Organisations

Directrice Cabinet Côté Travail

Christine Faure Patras

Psychologue du Travail et des Organisations



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